Page:Gautier, Loti - La Fille du Ciel (1912).djvu/78

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Il me trouvait belle, et son admiration fut, pour moi, une parure plus précieuse que le phénix impérial de ma coiffure. Ah ! j’ai bien compris, quand il s’est enfin prosterné, quel sentiment le jetait à mes pieds… Et mon fils, qui échangeait avec lui des signes d’intelligence ! D’où le connaît-il donc ? Et pourquoi n’ai-je même pas osé le lui demander, comme si, de moi à mon enfant, parler de cet homme était déjà criminel ?… Puissances bienfaisantes de la nuit, Esprits des ancêtres déifiés qui m’entourez dans l’air, Mânes augustes à qui j’ai rendu hommage au fond de vos temples d’or, descendez sur moi, assemblez-vous autour de votre fille indigne et défaillante !… Cet homme, cet étranger sur ma route, en un tel jour !… Ô divinités dont je suis descendue, écartez de mon âme jusqu’à son souvenir. Dans un serment solennel, j’ai dépouillé ma personnalité terrestre. Rien de moi n’est plus à moi. Fille du Ciel, impératrice et régente, j’appartiens toute à ma mission surhumaine… Faites que je triomphe des faiblesses qui étaient le charme de la vie. Faites que je ne sache plus qu’il y a des fleurs, des perles et des parfums ; accordez-moi d’oublier à jamais que l’amour est l’unique royaume de la femme, et la beauté sa vraie puis-