Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/331

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les soldats, dont on voyait luire les casques de bronze, occupaient des rangs séparés. — C’était un spectacle admirable que ces belles toges et ces larges manteaux blancs bien drapés, s’étalant sur les premiers gradins et contrastant avec les parures variées des femmes, placées au-dessus, et les capes grises des gens du peuple, relégués aux bancs supérieurs, près des colonnes qui supportent le toit, et qui laissaient apercevoir, par leurs interstices, un ciel d’un bleu intense comme le champ d’azur d’une panathénée ; — une fine pluie d’eau, aromatisée de safran, tombait des frises en gouttelettes imperceptibles et parfumait l’air qu’elle rafraîchissait. Octavien pensa aux émanations fétides qui vicient l’atmosphère de nos théâtres, si incommodes qu’on peut les considérer comme des lieux de torture, et il trouva que la civilisation n’avait pas beaucoup marché.

Le rideau, soutenu par une poutre transversale, s’abîma dans les profondeurs de l’orchestre, les musiciens s’installèrent dans leur tribune, et le Prologue parut vêtu grotesquement et la tête coiffée d’un masque difforme, adapté comme un casque.

Le Prologue, après avoir salué l’assistance et demandé les applaudissements, commença une argumentation bouffonne. « Les vieilles pièces, disait-il, étaient comme le vin qui gagne avec les années, et la Casina, chère aux vieillards,