Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/447

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Quant à son costume, il était très étrange.

Figurez-vous un pagne de bandelettes chamarrées d’hiéroglyphes noirs et rouges, empesées de bitume et qui semblaient appartenir à une momie fraîchement démaillotée.

Par un de ces sauts de pensée si fréquents dans les rêves, j’entendis la voix fausse et enrouée du marchand de bric-à-brac, qui répétait, comme un refrain monotone, la phrase qu’il avait dite dans sa boutique avec une intonation si énigmatique :

« Le vieux Pharaon ne sera pas content ; il aimait beaucoup sa fille, ce cher homme. »

Particularité étrange et qui ne me rassura guère, l’apparition n’avait qu’un seul pied, l’autre jambe était rompue à la cheville.

Elle se dirigea vers la table où le pied de momie s’agitait et frétillait avec un redoublement de vitesse. Arrivée là, elle s’appuya sur le rebord, et je vis une larme germer et perler dans ses yeux.

Quoiqu’elle ne parlât pas, je discernais clairement sa pensée : elle regardait le pied, car c’était bien le sien, avec une expression de tristesse coquette d’une grâce infinie ; mais le pied sautait et courait çà et là comme s’il eût été poussé par des ressorts d’acier.

Deux ou trois fois elle étendit sa main pour le saisir, mais elle n’y réussit pas.

Alors il s’établit entre la princesse Hermon-