Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/312

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les meubles ; la tapisserie fut probablement vendue avec le reste.

Toujours est-il qu’il y a quelque temps, en furetant chez un marchand de bric-à-brac pour trouver des momeries, je heurtai du pied un gros rouleau tout poudreux et couvert de toiles d’araignée.

« Qu’est cela ? dis-je à l’Auvergnat.

— C’est une tapisserie rococo qui représente les amours de madame Omphale et de monsieur Hercule ; c’est du Beauvais, tout en soie et joliment conservé. Achetez-moi donc cela pour votre cabinet ; je ne vous le vendrai pas cher, parce que c’est vous. »

Au nom d’Omphale, tout mon sang reflua sur mon cœur.

« Déroulez cette tapisserie », fis-je au marchand d’un ton bref et entrecoupé comme si j’avais la fièvre.

C’était bien elle.

Il me sembla que sa bouche me fit un gracieux sourire et que son œil s’alluma en rencontrant le mien.

« Combien en voulez-vous ?

— Mais je ne puis vous céder cela à moins de quatre cents francs, tout au juste.

— Je ne les ai pas sur moi. Je m’en vais les chercher ; avant une heure je suis ici. »

Je revins avec l’argent ; la tapisserie n’y était plus. Un Anglais l’avait marchandée pendant