Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/548

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― Ne crains rien ; je te donne ma parole royale qu’il ne te sera fait aucun mal.

― Pardonnez à votre esclave s’il ose encore, après une telle assurance, élever quelque objection. Avez-vous réfléchi que ce que vous me proposez est une profanation de la sainteté du mariage, une espèce d’adultère visuel ? Souvent la femme dépose la pudeur avec ses vêtements, et, une fois violée par le regard, sans avoir cessé d’être vertueuse elle peut croire qu’elle a perdu sa fleur de pureté. ― Vous me promettez de n’avoir aucun ressentiment ; mais qui m’assurera contre le courroux de Nyssia, elle si réservée, si chaste, d’une pudeur si inquiète, si farouche et si virginale, qu’on la dirait encore ignorante des lois de l’hymen ? Si elle vient à apprendre le sacrilège dont je vais me rendre coupable par déférence pour les volontés de mon maître, à quel supplice me condamnera-t-elle pour me faire expier un tel crime ? Qui pourra me mettre à l’abri de sa colère vengeresse ?

― Je ne te savais pas si sage et si prudent, dit Candaule avec un sourire légèrement ironique ; mais tous ces dangers sont imaginaires, et je te cacherai de façon que Nyssia ignore à tout jamais qu’elle a été vue par un autre que par son royal époux ».

Gygès, ne pouvant se défendre davantage, fit un signe d’assentiment pour montrer qu’il donnait les mains aux volontés du roi. ― Il