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Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/133

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LXV


Le comte Roland interpelle alors Charlemagne :
« Donnez-moi l’arc que vous tenez au poing.
« À mon escient on ne me reprochera pas
« Qu’il me tombe des mains comme il arriva à Ganelon,
770« Pour votre gant droit, quand il reçut le bâton. »
L’Empereur reste là, tête baissée ;
Il tourmente sa barbe, tord ses moustaches,
Et ne peut s’empêcher de pleurer.Aoi.


LXVI


Naimes ensuite est venu,
Qui a barbe blanche et cheveux blancs ;
775Il n’est point en la cour de meilleur vassal :
« Vous l’avez entendu, » dit-il au Roi ;
« Le comte Roland est en grande colère :
« Il est furieux, il est terrible.
" On lui a confié l’arrière-garde,
« Et certes il n’est pas de baron qui s’en charge à sa place.
780« Donnez-lui l’arc que vous avez tendu
« Et trouvez-lui bonne aide. »
Le Roi lui donna l’arc, et. Roland le reçut.Aoi.


LXVII


L’Empereur interpelle son neveu Roland :
« À coup sûr vous savez, beau sire neveu,
785« Que je vous veux donner la moitié de mon armée.
« Gardez-la près de vous : c’est votre salut.
« — Non, » dit le Comte, " non, je n’en ferai rien ;
« Et que Dieu me confonde, si je démens ma race !
« Je garderai seulement vingt mille Français, vingt mille vaillants.
790« Pour vous, passez les défilés en toute sûreté ;
« Vous n’avez pas un homme à craindre, tant que je vivrai ! »Aoi.