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CONSTANTINOPLE.

c’est dans cette mosquée que l’on conserve l’étendard du prophète, qui ne se déploie, comme l’oriflamme sous la vieille monarchie française, qu’aux occasions solennelles et suprêmes. Mahmoud le fit déployer lorsque, entouré des imans, il annonça au peuple prosterné la sentence d’extermination des janissaires.

— Un nimbar coiffé de son abat-voix conique ; des mastachés ou plate-formes soutenues de colonnettes d’où les muezlims appellent les croyants à la prière ; des lustres garnis de boules de cristal et d’œufs d’autruche, complètent la décoration, qui est la même pour toutes les mosquées ; — comme à Sainte-Sophie, sous les voûtes des bas-côtés s’entassent des coffres, des malles, des paquets, dépôts placés là sous la sauvegarde divine par la piété musulmane.

Près de la mosquée est le turbé ou tombeau d’Achmet, le glorieux padischa qui dort dans sa chapelle funèbre, sous son cercueil en dos d’âne couvert des plus précieuses étoffes de la perse et de l’Inde, ayant à sa tête son turban à l’aigrette de pierreries, à ses pieds deux énormes cierges gros comme des mâts de navire. — Une trentaine de cercueils de moindre dimension l’entourent : ce sont ceux de ses enfants et de ses femmes favorites, qui l’accompagnent dans la mort comme dans la vie. — Au fond d’une armoire étincellent ses sabres, ses kandjars, ses armes constellées de diamants, de saphirs et de rubis.

Cette description me dispense d’entrer dans de grands détails sur la mosquée du sultan Bayezid, qui n’en diffère que par de légères particularités d’architecture plus faciles à faire comprendre au crayon qu’à la plume. On y remarque, à l’intérieur, de belles colonnes de jaspe et de porphyre africain ; — au-dessus du cloître qui l’accompagne voltigent perpétuellement des essaims de pigeons aussi fami-