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FUSAINS ET EAUX-FORTES.

un spectacle très amusant à l’œil. Enfin, l’on arriva au bouquet ; il s’épanouit dans l’obscurité, comme une grande gerbe d’épis d’or, aux barbes d’argent entremêlées de pavots et de bluets de flamme, ou comme la queue du paon de Junon, faisant la roue auprès du trône lumineux de sa belle maîtresse ; puis tout s’éteignit et il ne resta qu’un grand nuage d’un blanc laiteux avec des ombres blondes comme celles des camées, que le vent pétrissait et déformait de ses mains invisibles.

Je relevai la tête, et je vis les étoiles avec leur prunelle jaune comme des yeux de lion, qui regardaient d’un air moqueur les lampions qui s’éteignaient elles brillaient, papillonnaient, scintillaient, flamboyaient dans l’air froid de la nuit et redoublaient d’éclat, à mesure que la fête pâlissait ; elles semblaient dire : Quelle illumination vaut la nôtre qui s’allume tous les soirs et à laquelle personne ne prend garde ? Quoique j’eusse trouvé le feu d’artifice fort beau, je ne puis m’empêcher d’être de l’avis des étoiles. Mon paradoxal ami me soutint que les lampions étaient plus agréables et finit la soirée en me démontrant que j’avais les cheveux rouges.

(La Charte de 1830, 3 octobre 1837.)