Aller au contenu

Page:Gautier - Fusains et eaux-fortes.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
278
FUSAINS ET EAUX-FORTES.

Théophile était excellente, il savait du grec et du latin autant qu’un érudit de cabinet ; il a traduit le Phédon, écrit des lettres d’une latinité irréprochable, et son histoire de Larissa semble un fragment retrouvé d’Apulée ou de Pétrone. Nourri de la moelle de l’antiquité, il l’avait digérée, et il ne la rendait pas toute crue, comme font les pédants. Chez lui, la poésie n’empêchait pas le sens critique ; ses jugements littéraires sont d’une lucidité remarquable.

Tout en rendant à Malherbe la stricte justice qu’il mérite, Théophile se moque des imitateurs de ce sec poète, en vers pleins d’ironie et de verve, dont Boileau s’est peut-être un peu trop souvenu, et raille ces gratteurs de syllabes, ces poseurs de diphtongues qui cherchent un mois

 
comment à fils emphis
Pourra s’apatrier la rime de Memphis,


et s’imaginent avoir fait un monument parce qu’ils ont passé de longues heures à un travail stérile et barbouillé une rame de papier pour arrondir une strophe.

La tragédie de Pyrame et Thisbé quoiqu’elle ait obtenu du succès et tenu honorablement sa place à la scène, dans un temps où Corneille et Molière n’avaient pas encore régénéré le théâtre, n’est pas une œuvre qui porte le cachet distinctif de l’auteur. Le métier de poète dramatique n’allait pas à Théo-