Page:Gautier - Histoire de l’art dramatique en France depuis vingt-cinq ans, 6e série.djvu/317

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et déroute. Un aride souffle janséniste dessèche toutes ses belles fleurs, une brume grisâtre estompe ses splendides horizons, et l’ennui descend, comme une pluie fine et glacée, d’un terne ciel d’automne dont un rigorisme impitoyable a éteint l’azur. Tous ces sacrifices se font au nom de la simplicité, et pour obtenir nous ne savons quelle harmonie triste assoupissante à l’œil. Simplicité, harmonie, voilà de beaux mots, mais il n’en faut pas abuser. La simplicité voulue est souvent plate, et l’harmonie qui résulte de l’absence des tons et non de leur accord n’est que de la grisaille. Nous comprenons que le poëte, par cette facilité d’avatars qui le rapproche des dieux de la mythologie hindoue, aime à s’absenter de son corps et à revêtir, pour quelque temps, une individualité différente. George Sand a eu cette fantaisie d’habiter l’âme de Sedaine et de Berquin, mais il serait temps qu’elle revînt à son moi abandonné.

Les Vacances de Pandolphe nous avaient donné bon espoir ; Watteau nous semblait un heureux correctif de la fadeur bourgeoise et rustique qu’affecte George Sand depuis trop longtemps déjà nous disons affecte, car il y a système et non affaiblissement chez ce talent robuste, qui peut fournir encore une longue carrière, et c’est pour cela que nous combattons avec une certaine insistance ces tendances funestes ; il nous serait facile de jeter sur cette demi-chute les fleurs banales de cette indulgence qui ne trompe pas même l’amour-propre, si crédule pourtant ; nous augurons assez bien de la mâle et fière nature de George Sand pour lui dire de saines vérités qu’elle préférera, sans nul doute, à des éloges frelatés et doucereux. Pour animer des personnages de Watteau, il eût fallu l’esprit de Marivaux, la caprice de Gozzi, la grâce tendrement maniérée de Florian, qualités ou défauts, si l’on veut, qui manquent totalement à ce talent sérieux, ardent, passionné, admirablement descriptif, mais qui n’a pas le plus petit mot pour rire.



16 mars.

PALAIS-ROYAL. La Maman Sabouleux. La Maman Sabouleux est une excellente parade dans ce genre fabuleux, exorbitant, pyramidal et cocasse qui convient surtout au théâtre du Palais-Royal et à sa troupe de bouffons ; nous aimons ces farces énormes, d’une jovia-