d’ailleurs pour la comédie que pour le drame. Seul Joanny réalisait l’idéal de Ruy Gomez de Silva. Il était enchanté de son rôle et il y croyait absolument. Sa main mutilée à la guerre lui donnait l’air d’un héros en retraite, et il disait superbement ce vers :
Ressaye à soixante ans ton harnois de bataille.
Delaunay a joué Hernani avec une rare intelligence et il est difficile de lutter plus habilement contre une physionomie qui est naturellement charmante et qui, pendant quatre actes du drame, doit être sinistre, orageuse et fatale. Mais au dénoûment, quand le bandit redevenu grand seigneur a dépouillé ses guenilles de salteador, Delaunay, rentré dans son milieu de grâce et d’élégance, joue admirablement la scène d’amour et d’agonie. Ruy Gomez, « le vieillard stupide, » est représenté par Maubant avec une dignité, une mélancolie et un sentiment de la vie féodale qu’on ne saurait trop louer ; il a dit de la façon la plus noble, la plus paternelle et la plus touchante, la déclaration d’amour du bon vieux duc. Brossant a derrière les portraits historiques de Charles-Quint retrouvé un don Carlos jeune, brave et galant avec une légère barbe dorée admirablement réussie. Il a bien dit le grand monologue. Quant à mademoiselle Favart, elle est la véritable doña Sol ; hautaine et soumise à la fois, faisant plier sa fierté