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Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/260

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un chef d’orchestre, il inspirait et conduisait tout un monde de sculpteurs, de dessinateurs, d’ornemanistes, de graveurs, d’émailleurs et de joailliers, car l’orfèvre aujourd’hui n’a plus le temps de ceindre le tablier et de tourmenter lui-même le métal pour le forcer à prendre des formes diverses. Pradier, David, Feuchères, Cavelier, Préault, Schœnwerk, Pascal, Rouillaud, ont été traduits en or, en argent, en fer oxydé, par Froment Meurice. Il a réduit leurs statues en épingles, en pommes de canne, en candélabres, en pieds de coupe, les entourant de rinceaux d’émail et de fleurs, de pierreries ; faisant tenir à la Vérité un diamant pour miroir, donnant des ailes de saphir aux anges, des grappes de rubis aux Érigones. Du reste, il ne cherchait à absorber la gloire de personne, sachant que la sienne se suffisait, et aux expositions il indiquait loyalement le nom de ses collaborateurs, artisans ou artistes.

Ce serait un long travail que de récapituler les œuvres si nombreuses qui ont valu à Froment Meurice la réputation qu’il laisse : surtouts, toilettes, aiguières, coffrets, écrins, châsses byzantines, ostensoirs, calices, coupes, boucliers, cachets, bagues, bracelets, colliers, tabatières ; il a su varier à l’infini ces créations fantasques du monde de l’ornement où la femme jaillit du calice de la fleur, où la chimère se termine en feuillage, où la salamandre se tord dans un feu de rubis, où le lézard fuit sous des herbes d’émeraude, où l’arabesque embrouille à plaisir ses entrelacs et ses complications ; il a fait