Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/317

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que par la nouvelle école. Le poëme d’Éleusis, le Cap Sunium et d’autres pièces encore témoignent de cette inspiration archaïque et alexandrine.

Laprade a fait aussi les Poèmes évangéliques, où il baptise l’art grec avec l’eau du Jourdain ; mais le fond de sa nature est une sorte de panthéisme spirilualiste. Sa gloire, discrète et craignant un peu la foule, n’a pas eu le retentissement tumultueux qui fait arriver un poëte au public ; mais il n’a pas été sans action sur les esprits littéraires, et son influence est reconnaissable dans plus d’une œuvre célèbre ou vantée.

De ces courants poétiques, fleuves, rivières, torrents, ruisseaux, les uns se sont arrêtés ou taris ; les autres continuent à couler, s’élargissant à mesure qu’ils approchent de la mer. Les poètes de la génération actuelle ont tous puisé à ces eaux vives, les uns avec un cratère d’or, les autres avec une coupe en argile ou en bois de hêtre, d’autres dans le creux de leur main ; mais toujours quelques gouttes de ces ondes se mêlent au vin de leur cru. Qu’on ne voie pas là un reproche ; l’originalité n’est que la note personnelle ajoutée au fonds commun préparé par les contemporains ou les prédécesseurs immédiats.

Nous abrégeons autant que possible ces prolégomènes indispensables. Dans l’art comme dans la réalité, on est toujours fils de quelqu’un, même quand le père est renié par l’enfant, et il nous fallait bien faire la généalogie des talents dont nous