Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/318

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allons avoir à nous occuper. Pour beaucoup d’entre eux, éclos après le grand mouvement romantique, nous serons obligé de remonter un peu au delà de 1848. Leur point de départ doit se chercher une dizaine d’années plus haut, bien que la meilleure partie de leur œuvre appartienne à l’époque où se circonscrit notre travail.

Après le grand épanouissement poétique, qui ne peut se comparer qu’à la floraison de la Renaissance, il y eut un regain abondant. Tout jeune homme fit son volume de vers empreint de l’imitation du maître préféré, et quelquefois mêlant plusieurs imitations ensemble. De cette voie lactée, aux nébuleuses innombrables et peu distinctes traversant le ciel de sa blancheur, le premier qui se détacha, avec un scintillement vif et particulier, fut Théodore de Banville. Son premier volume, intitulé les Cariatides, porte la date de 1841, et fit sensation. Quoique l’école romantique eût habitué à la précocité dans le talent, on s’étonna de trouver des mérites si rares en un si jeune homme. Théodore de Banville avait vingt et un an à peine et pouvait réclamer cette qualité de mineur si fièrement inscrite par lord Byron au frontispice de ses Heures de loisir. Sans doute, dans ce recueil aux pièces diverses de ton et d’allure, on put reconnaître çà et là l’influence de Victor Hugo, d’Alfred de Musset et de Ronsard, dont le poëte est resté à bon droit le fervent admirateur ; mais on y discerne déjà facilement la nature propre de l’homme. Théodore de