Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/36

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dire que l’on retrouve dans son œuvre écrite les noirs profonds de la gravure anglaise.

Petrus aussi cherchait sa voie. De l’atelier de l’architecte il était passé à l’atelier d’Eugène Devéria, essayant la peinture, mais si l’on peut employer une locution si classique dans une histoire du Romantisme, nous le soupçonnons d’avoir dès ce temps secrètement courtisé la Muse. Gérard était parmi nous le seul lettré dans l’acception où se prenait ce mot au milieu du dix-huitième siècle. Il était plus subjectif qu’objectif, s’occupait plus de l’idée que de l’image, comprenait la nature un peu à la façon de Jean-Jacques Rousseau, dans ses rapports avec l’homme ; n’avait qu’un goût médiocre aux tableaux et aux statues, et malgré son commerce assidu avec l’Allemagne et sa familiarité avec Gœthe, restait beaucoup plus Français qu’aucun de nous ; de race, de tempérament et d’esprit.

Cette immixtion de l’art dans la poésie a été et demeure un des signes caractéristiques de la nouvelle École, et fait comprendre pourquoi ses premiers adeptes se recrutèrent plutôt parmi les artistes que parmi les gens de lettres. Une foule d’objets, d’images, de comparaisons, qu’on croyait irréductibles au verbe, sont entrés dans le langage et y sont restés. La sphère de la littérature s’est élargie et renferme maintenant la sphère de l’art dans son orbe immense.

Telle était la situation de nos esprits ; les arts nous sollicitaient par les formes séduisantes qu’ils