Je continuai à marcher néanmoins, dans une agitation croissante, m’égarant dans les fourrés, sous les arbres touffus du parc. La nuit, qui venait, m’impressionnait d’une façon pénible, le frissonnement des feuilles se prolongeait sur mes nerfs, et lorsque la lune, énorme et pourpre, surgit lentement derrière les branches, je crus voir un fantôme couvert de sang.
Je faisais de vains efforts pour réagir contre cet état fiévreux : je ne sais quelle attente douloureuse me serrait le cœur, quelque chose m’empêchait de partir et me disait que le drame n’était pas achevé. Je me hâtai pourtant de sortir du couvert dont l’ombre épaisse me pesait.
Des voix contenues, et un bruit que je ne m’expliquais pas, attirèrent mon attention. J’aperçus dans le crépuscule un groupe qui s’agitait, et, désireux de n’être plus seul, je me dirigeai vers lui.
C’étaient les jardiniers et les serviteurs de la villa qui, en apprenant la mort affreuse du petit Pepino, qu’ils chérissaient tous, avaient eu spontanément la pensée de se venger sur la plante inconsciente qui avait causé le mal et à laquelle ils prêtaient une sorte d’âme vénéneuse. Ils s’étaient donc armés de bêches