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LE FRUIT DÉFENDU.

plus magnifique salle du palais de Pékin, et accomplissant, devant le Fils du Ciel, à peine plus brillant que lui-même, la plus solennelle des salutations : le San-Koui-Kiou-To !

Durant trois lunes, Sang-Yong ne se sépara point de son brillant costume ; quand les affaires de son négoce l’obligeaient à paraître dans sa boutique, ou quand les promenades nécessaires pour conserver sa santé et pour entretenir son appétit, enfin revenu, le conduisaient dans les rues de la ville, il jetait sur ses épaules une seconde robe, noire ou grise ; mais, sous ce vêtement méprisé, il portait sa robe jaune dont il entendait en marchant frémir les plis somptueux, et qu’il tâtait souvent avec délices.

Un matin de printemps, il sortit avant la dixième heure, car le ciel, admirablement pur, invitait à de longues promenades. Il traversa la vieille ville tartare, où il demeurait, et, après avoir franchi la porte du Sud, entra dans la ville chinoise, qu’un long mur transversal sépare de la cité ancienne, interdite aux barbares. Il atteignit rapidement l’enceinte de Canton, et se dirigea vers la Rivière des Perles. Malgré l’heure peu avancée, la rive septentrionale du fleuve était encombrée et