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ISOLINE

le vrai chemin breton dans son horreur hivernale.

Bientôt ce chemin descendit, s’encaissa entre deux talus, devint un ruisseau navigable. Gilbert escalada, s’accrochant aux branches trempées ; la terre, cédant sous son pied, s’éboulait en faisant rejaillir l’eau. Des paquets de ronces amassés dans les endroits accessibles, par l’humeur peu hospitalière des paysans, lui déchirèrent les mains, s’accrochèrent à ses habits ; il s’entêta, marcha dans l’herbe où chacun de ses pas laissait un trou qui s’emplissait d’eau ; il faisait de grandes enjambées, sautait, visant une pierre ou un bout de terre qu’il croyait solide et qui le trahissait.

Enfin, suant et hors d’haleine, il reprit pied sur la grande route de Dinan.

Le val de la Conninais descend à pic de l’autre bord de cette route qui forme à cet endroit une rampe assez raide. Juste en face de l’allée dont le jeune homme débouchait, de l’autre côté de la vallée, en haut de la pente cachée par les grands arbres qui l’escaladent, le château se montre à demi dans les feuillages sombres. Des sapins, des chênes verts et autres essences, que l’hiver ne dépouille pas, semblent le prendre d’assaut, l’enfouir