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L’ORIENT.

verdoyer en feuilles énormes et bizarres, s’épanouir en calices éclatants toutes ces fleurs et ces herbes mortes. Elles germent et végètent avec une activité incroyable, comme ce rosier des soirées magiques qui pousse à vue d’œil ; leurs odorants effluves embaument l’air. Les échantillons de bois reprennent leur écorce et se dilatent en forêts, les lichens jettent leurs balançoires d’un arbre à l’autre. Les cantharides tourbillonnent dans un rayon de soleil, et le bupreste mange le cœur de la rose du Bengale. Un paysage immense sort de ces étroits casiers.

Faudra-t-il beaucoup de peine pour rendre la vie à ces peaux de tigre clouées contre le mur et les faire bondir comme dans un roman de Méry ? Ce grand monstre fauve rayé de noir, dont le mufle aplati conserve encore sa férocité, doit être un comparse de l’histoire d’Héva. Peut-être est-ce Mounoussamy, le sauvage époux à formes d’éléphant, qui lui a planté cette balle entre les yeux, à moins qu’il n’ait été devancé par le spirituel et paradoxal Edwards Klerbbs. Que de pau-