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L’ORIENT.

étranges et pittoresques, bordée d’un côté par les murailles crénelées, les kiosques et les cyprès du vieux sérail ; de l’autre, par les constructions de Galata et de Péra, que surmonte de son toit de cuivre vert-de-grisé la vielle tour des Génois, pendant de la tour du Séraskier, dressée sur l’autre rive ; et lorsqu’on se retourne vers Kadi-Keuï, quel superbe spectacle encore ! Au fond, l’Olympe de Bithynie, dessinant sa silhouette d’azur glacée au sommet d’une neige éternelle ; les côtes d’Anatolie aux lignes suaves estompées par une brume de lumière ; les îles des Princes, constellant les eaux étincelantes de la mer de Marmara de leur gracieux archipel ; vers la gauche, Scutari, ce faubourg asiatique de Constantinople, découpant ses maisons coloriées et les minarets blancs de ses mosquées sur l’immense rideau de cyprès de son cimetière, si beau qu’il donne envie de mourir.

Si l’on remonte le Bosphore, quelle série d’enchantements, quelle suite de tableaux magiques ! L’œil reste incertain entre la rive d’Europe et la rive d’Asie, toutes deux égale-