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L’ORIENT.

s’arrête au large dans la rade, et au fond du golfe la ville apparaît au bord de la mer bleue comme une dentelure d’argent. Il s’agit d’y arriver. Sur le pont du navire se trémoussait un personnage bizarre, de physionomie grotesque et avenante, moitié drogman, moitié cicérone, un peu domestique, parlant à peu près toutes les langues, assommant et fort utile et même indispensable, du nom de Karoubi. Ce fut lui qui se chargea de piloter le nouveau venu, et, malgré son horreur des guides, M. Léon Michel fut obligé de l’accepter. À voir le livre de Tunis si bien rempli et si bien renseigné, on doit croire qu’El-Karoubi ne s’était pas trop vanté.

Une fois engagé dans ce blanc dédale, où les maisons semblent tourner le dos à la rue, ne montrant que d’étroites ouvertures grillées ou des portes basses étoilées symétriquement de clous, M. Léon Michel ouvre son album de croquis, et ne laisse pas passer une figure originale sans la noter. Il s’assoit sur la natte des cafés, pénétrant dans les souks