Page:Gautier - L’Orient, tome 2, Charpentier-Fasquelle, 1893.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34
L’ORIENT.

nent un caractère asiatique et sauvage ; pour les yeux, ils sont d’une beauté et d’un brillant incomparables. On dirait deux soleils de jais roulant sur des cieux de cristal : c’est une transparence, une limpidité, un éclat onctueux et velouté, une langueur extatique et voluptueuse dont on ne peut se faire une idée. Toute la vie de la figure semble s’être réfugiée dans ces yeux miraculeux ; le reste de la face est immobile comme un masque de bronze : un vague sourire entr’ouvre seulement un peu les lèvres, et fait respirer toute cette quiétude. La toilette d’Amani est bizarre et charmante comme sa personne : une ligne jaune, tracée au pinceau et renouvelée tous les jours, s’étend sur son front, de la raie des cheveux à la jonction des sourcils ; sa chevelure, séparée en bandeaux et nattée à la mode des Suissesses, fait ressortir, par son noir vigoureux, l’éclat papillotant du clinquant et des verroteries dont elle est ornée ; une calotte de cuivre, sur laquelle est ciselée une couleuvre, occupe au sommet de la tête la place où nos femmes attachent leurs chignons :