Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 2.djvu/24

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Toza donna des ordres aux chefs des troupes qu’il laissait, puis il se hâta de gagner Chozan, où ses navires l’attendaient. Ce seigneur ne voulait pas laisser plus longtemps ses États sans défense, il craignait le voisinage du prince d’Awa qu’il croyait dévoué à Fidé-Yori.

Lorsque les jonques eurent quitté la côte et firent voile dans la mer intérieure vers le canal de Boungo, le prince vint saluer sa prisonnière. Il l’avait installée sous une tente superbe, à l’arrière du plus beau navire, celui qu’il montait lui-même. Fatkoura était assise sur un banc recouvert d’un riche tapis ; elle fixait ses regards sur les rivages de Nagato, qui disparaissaient dans le lointain inondé de lumière.

— As-tu quelque désir, belle princesse ? demanda Toza, veux-tu que je te fasse monter des friandises ? Aimerais-tu à entendre le son de la flûte ou du biva[1] ?

— Tous mes désirs sont restés sur cette terre que je quitte, dit-elle, je n’en emporte qu’un seul, celui de la mort.

— Je respecte ta douleur, dit le prince, qui se retira.

Mais il s’éloigna peu ; il se promenait sur le pont, et, comme malgré lui, revenait sou-

  1. Sorte de guitare.