Page:Gautier - La Chanson de Roland - 1.djvu/130

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
cxxviij
INTRODUCTION

nos meilleures Chansons de geste. C’est presque une traduction. L’auteur islandais fait entrer dans son œuvre un certain nombre de nos vieux poëmes, dont quelques-uns ne sont point parvenus jusqu’à nous dans leur langue originale. On peut juger par là de la popularité de notre épopée chez des peuples qui étaient si longtemps demeurés étrangers à la civilisation chrétienne. Mais M. Gaston Paris fait remarquer avec raison que cette popularité n’était pas de longue date, et qu’elle fut surtout l’œuvre d’un roi intelligent, Haquin V. C’est pendant son règne (1217-1263) que furent sans doute composées ces Sagas, empruntées à nos romans, Rollants rimur[1], Feraguts rimur[2] et tant d’autres[3]. Mais c’est à cette époque surtout qu’il convient de faire remonter la Karlamagnus’s Saga. Cette œuvre, inconnue en France avant les travaux de M. G. Paris, se divise en dix branches : notre Roncevaux forme la huitième. Jusqu’à la mort de Roland, le compilateur islandais ne fait que suivre très-servilement le texte primitif de notre Chanson, d’après un manuscrit fort semblable à celui d’Oxford. Mais, à cet endroit de son récit, il a trouvé sans doute que le modèle français devenait un peu long, et il l’a vigoureusement abrégé.En cinq

    de Roncevaux. Or, cette partie de la compilation islandaise est, comme nous le dirons plus bas, servilement copiée sur une antique version de notre Roland, sur un texte français qui diffère légèrement de celui d’Oxford. Suivant M. G. Paris, ces différences sont très-peu importantes et à peine appréciables ; si bien que l’auteur de l’Histoire poétique de Charlemagne a dû renoncer à donner de cette branche de la Saga une analyse qui eût par trop ressemblé à la vieille Chanson française. (l. I. XXV, p. 35.) ═ Il convient toutefois de répéter ici que le traducteur islandais s’est fatigué sans doute de reproduire tout notre ancien poëme et qu’après la mort de Roland, il a pris subitement la résolution d’abréger très-fort son original français. Cinq ou six pages lui suffisent depuis lors pour résumer toute la fin du Roland (dix-sept cents vers !). C’est bien peu ; néanmoins nous offrons à notre lecteur, pour la première fois traduite en français, cette fin du Roncevaux islandais. (V. dans nos Notes et Variantes la note du v. 4002 et dernier.)

  1. Ms. de la Bibl. de Stockholm, no 22 et no 1.
  2. Ms. de la même Bibliothèque, no 7.
  3. V. Geoffroy, Notices et extraits de manuscrits concernant l’histoire ou la littérature de la France, qui sont conservés en Suède, Danemark et Norwége. (Paris, 1855.)