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NOTES ET VARIANTES, VERS 2295

de ces miniatures, et notamment celle qui se rapporte aux deux strophes clxxii et clxxiii. Roland y est représenté au moment où il frappe le païen de son « olifant ». Rien n’est moins artistique. Mais l’archéologue ne dédaignera pas ces dessins naïfs, qui sont, tout au moins, précieux pour l’histoire du costume et de l’armure. On trouvera un peu plus loin (au v. 2452) la reproduction de l’autre miniature, laquelle représente saint Gabriel apparaissant à Charlemagne. ═ Nous avons déjà parlé du Ruolandes Liet dans notre Introduction, et avons particulièrement insisté sur le caractère ecclésiastique de cette œuvre. Mais nous n’en avons cité qu’un fragment insuffisant. Nous devons à l’obligeance de M. Gaston Paris la traduction de deux autres épisodes du poëme allemand, qui correspondent, le premier aux vers 1124 et ss. ; le second aux vers 1325 et ss. de notre Chanson française. Nous les plaçons ici sous les yeux de notre lecteur, qui se convaincra par là combien l’œuvre du curé Conrad offre une physionomie plus religieuse, plus cléricale que notre Roland. Telle est, du moins, la conclusion que l’on tirera, suivant nous, de la lecture des deux fragments suivants.

I. Quand les héros apprirent — que les païens étaient en nombre, ils demandèrent à leur prêtre — de se préparer. — Ils allèrent à leur « service », — reçurent le corps de Dieu, — se prosternèrent, priant pour leurs péchés, — jetèrent des cris au ciel ; — bien plus d’une fois — ils conjurèrent Dieu, par les blessures — avec lesquelles il racheta les siens, — de les soutenir, — de leur pardonner leurs péchés — et d’être lui-même leur témoin. — Ils se garantirent par la confession ; — ils se préparèrent à la mort. — Et pourtant c’étaient de bons vassaux, — disposés au martyre — pour le salut de leur âme. — C’étaient vraiment des guerriers de Dieu. — Ils ne songeaient pas à s’enfuir ; — mais ils désiraient reconquérir notre ancien héritage ; — et tel était le but des efforts de ces héros. — Oui, c’étaient de nobles seigneurs, — d’une vie chrétienne. — Ils n’avaient tous qu’un seul courage ; — leur cœur était dirigé vers Dieu ; — ils avaient de la retenue et de la honte, — de la chasteté et de l’obéissance, — de la patience et de l’amour ; — ils brûlaient véritablement en dedans — d’amour pour la douceur de Dieu. — Il faut qu’ils nous aident — à oublier la misère de cette vie, — maintenant qu’ils possèdent le royaume céleste.

Quand les héros de Dieu, — par des psaumes, par des prières, — par la confession, par des actes de foi, — avec leurs yeux en pleurs, — en grande humilité, — et par des bontés de toute sorte, — se furent joints à Dieu, — quand ils eurent nourri leurs âmes — du pain sacré — et du sang divin — pour la vie éternelle, — alors les héros s’armèrent ; — alors ils louèrent Dieu, — Ils étaient tous ensemble joyeux, — comme