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NOTES ET VARIANTES, VERS 2502-2505

poëme français.) Depuis lors, le cri national des Franks fut Munjoie. (Dans la Saga, Mungeoy.) Le Faux Turpin, de son côté, appelle l’épée de Charles Gaudiosa ; l’auteur de Philomena, Jocosa, et Guillaume le Breton, Jucunda. ═ f. Le mot Joyeuse signifie « précieuse », et ce nom de Monjoie (meum gaudium) se rapporte à l’épée de Charlemagne dans le sens de joyau précieux. « Ce qui achève de le prouver, c’est le nom de Précieuse donné à son épée par l’amiral Baligant, en rivalité de la Joyeuse de Charlemagne. » (Génin, Roland, p. 422.) ═ j. Joyeuse a certains caractères distinctifs qu’il convient d’énumérer. Sa clarté est incomparable : Unches ne fut sa per. — Ki cascun jur muet XXX clartez. (Vers 2501, 2502). Ki pur soleil sa claretet n’en muet. (Vers 2990.) Elle tremble quand on la tient nue. (Prise d’Alexandre, xiiie s., cité par G. Paris, Hist. poet. de Charlemagne, 373.) Enfin, elle préserve de l’empoisonnement son heureux possesseur ; nous croyons du moins qu’il faut ainsi comprendre ces vers d’Aspremont : Qui l’a sor lui ja ne soit en pensé — Que au mangier l’ait on empoisonné. (G. Paris, l. I.) Aux mains de Charles, c’est une arme terrible : « Il était d’une si grande vigueur, dit la Chronique de Turpin, que d’un seul coup de son épée il tranchait le cheval et le cavalier. » (Cap. xx.) Au combat de Saint-Faconde, le roi des Franks le fit bien voir. Tirant Joyeuse du fourreau, il trancha par le milieu du corps un grand nombre de païens. (Ibid., cap. viii.) ═ g. C’est cette épée cependant qui lui fut très-insolemment volée par l’enchanteur Maugis. (Renaus de Montauban, édit. Michelant, p. 306.) ═ h. D’après le Couronnement Looys (B. N. 774, f° 19, 2°), on n’a pas couché, mais assis dans son tombeau le grand empereur mort ; son épée a été placée dans son poing, et elle menace encore les païens, « la pute gent averse. » ═ i. D’autres poëtes mettent ensuite Joyeuse aux mains de Guillaume au Court-Nez : Cho est Joiuse où durement se fie. (Aliscans, vers 469 de l’éd. Guessard. — Voir aussi d’autres textes dans le Roland de Fr. Michel, 1re éd., pp. 193, 194.)

Vers 2502-2505. — Karlamagnus resta ceint de son épée, nommée Joius, qui était à trente couleurs pour chaque jour. Et il possède un clou avec lequel Notre-Seigneur fut attaché à la croix. Il l’a mis dans le pommeau de son épée, et, à l’extrémité, quelque chose de la lance du Seigneur, avec laquelle il fut percé. (Karlamagnus Saga, ch. xxxviii.) Notre Chanson ne parle pas du saint Clou. ═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike abrége violemment tout ce passage.

Vers 2504.Naffret. O. Pour le cas sujet, il faut nafrez.

Vers 2505.Carles en a l’amure... La lance dont Notre-Seigneur fut percé sur la croix, a été l’objet de nombreux récits pendant toute la durée du moyen âge. Il est facile de reconnaître ici deux grands courants