Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/109

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Le Christ, d’un ton railleur, tord l’éponge de fiel
Sur les lèvres en feu du monde à l’agonie,
Et Dieu, dans son Delta, rit d’un rire cruel.

Quand notre passion sera-t-elle finie ?
Le sang coule avec l’eau de notre flanc ouvert ;
La sueur rouge teint notre face jaunie.

Assez comme cela nous avons trop souffert.
De nos lèvres, Seigneur, détournez ce calice,
Car pour nous racheter votre fils s’est offert.

Christ n’y peut rien : il faut que le sort s’accomplisse ;
Pour sauver ce vieux monde il faut un Dieu nouveau,
Et le prêtre demande un autre sacrifice.

Voici bien deux mille ans que l’on saigne l’agneau ;
Il est mort à la fin, et sa gorge épuisée
N’a plus assez de sang pour teindre le couteau.

Le Dieu ne viendra pas. L’Église est renversée.