Son groom ne pèse pas plus de soixante livres ;
C’est une Philaminte, elle lit tous les livres,
Cause fort bien musique, et peinture pas mal ;
Elle suit l’Opéra, ne manque pas un bal ;
Poitrinaire tout juste assez pour être artiste,
Elle a toujours en main un mouchoir de batiste.
On ne la verra pas enterrer tristement
Dans quelque Sierra son teint pâle et charmant,
Ses grâces de malade et ses petites mines ;
Ni sous les noirs arceaux d’un couvent en ruines,
Promener loin du bruit ses méditations :
Il faut à ses douleurs la rampe et les lampions,
Il faut que les journaux en puissent rendre compte ;
Chaque pleur de ses yeux se cristallise en conte ;
Avec chaque soupir elle souffle un roman ;
Elle meurt ; mais ce n’est que littérairement.
Un frais cottage anglais, voilà sa Thébaïde ;
Et si son front de nacre est coupé d’une ride,
Ce n’est pas, croyez-moi, qu’elle songe à la mort :
Pour craindre quelque chose elle est trop esprit fort.
Mais c’est que de Paris une robe attendue
Arrive chiffonnée et de taches perdue.
Ah ! quelle différence, et que près de ces vieux
Nous paraissons mesquins ! Le sang de nos aïeux,
Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/149
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.