Page:Gautier - La Comédie de la mort.djvu/221

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Les faux dilettanti s’érigeant en artistes,
Les milords ennuyés et les rimeurs touristes,
Les petits lords Byrons fondent de toutes parts
Sur ton cadavre à terre, ô mère des Césars ;
Ils s’en vont mesurant la colonne et l’arcade ;
L’un se pâme au rocher et l’autre à la cascade :
Ce sont, à chaque pas, des admirations,
Des yeux levés en l’air et des contorsions :
Au moindre bloc informe et dévoré de mousse,
Au moindre pan de mur où le lentisque pousse,
On pleure d’aise, on tombe en des ravissements
À faire de pitié rire les monuments.
L’un avec son lorgnon collant le nez aux fresques,
Tâche de trouver beaux tes damnés gigantesques,
Ô pauvre Michel-Ange, et cherche en son cahier
Pour savoir si c’est là qu’il doit s’extasier ;
L’autre, plus amateur de ruines antiques,
Ne rêve que frontons, corniches et portiques,
Baise chaque pavé de la Via-Lata,
Ne croit qu’en Jupiter et jure par Vesta.
De mots italiens fardant leurs rimes blêmes,
Ceux-ci vont arrangeant leur voyage en poëmes,
Et sur de grands tableaux font de petits sonnets :
Artistes et dandies, roturiers, baronnets,