Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— On l’ignore ; il fuit la cour du vieux Nizam-el-Molouk, où l’assassinat et le poison sont à craindre pour lui.

— Pourquoi cela ? a-t-il des ennemis ?

— Pas plus qu’un autre ; mais autour des trônes c’est ainsi. Le soubab a plus de cent ans, et l’on dit que sa succession sera très disputée.

— Alors, mon rival s’appelle le Lion terrible, reprit Bussy, après un silence, il a vingt ans, il est prince, et peut espérer être le maître d’un des plus beaux royaumes du monde. Voilà bien des avantages sur un simple capitaine des volontaires !

— Mais il n’est pas aimé sans doute. Ce mariage dont on parle depuis longtemps, est toujours retardé.

— Peut-être ce Salabet Cingh est-il très laid, difforme, peut-être est-il boiteux comme Timour, dit Bussy en riant. Pendant que nous y sommes, nous pouvons accumuler sur sa tête toutes les malchances et impossibilités de plaire ; ce qui ne mettra pas un atout de plus à notre jeu. Ah ! mon Naïk, j’ai bien besoin de ton philtre sacrilège, et j’aurai du mal à attendre le bon plaisir des salamandres !

Et Bussy ferma les yeux comme pour dormir ; mais Naïk, penché vers lui et l’éventant doucement, l’entendit bientôt murmurer :

— Vraiment ! rien n’est aussi délicieux que ce nom d’Ourvaci !