Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/147

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Son compagnon brille auprès de lui comme une étoile prés de la lune ; il est vêtu d’étoffe d’argent et armé seulement d’un poignard. Des esclaves marchent de chaque côté, agitant autour des chevaux, de longs époussetoirs de crin, pour éloigner les mouches.

— L’étape est longue, ce matin, dit le jeune homme qui chevauche le premier ; le soleil est haut déjà et verse une pluie de feu à travers les feuillages.

— Je crois voir briller la soie de nos tentes, au bas de cette côte, dit l’autre, là, tout près de la rivière, à l’ombre d’un bois touffu.

— L’endroit est bien choisi. Hâtons-nous donc, et gagnons plus vite notre repos.

On presse l’allure des chevaux, on les lance sur la pente, veloutée de gazons épais qui assourdissent le bruit des pas ; et bientôt les jeunes cavaliers s’arrêtent et sautent à terre, sans être aidés de personne, devant une tente magnifique, en satin rouge sur lequel sont brodées des scènes du Ramayana. L’intérieur est aménagé comme une salle de palais : des tapis, des coussins de soie, le houka incrusté de pierreries, les esclaves agitant des éventails de plumes. Une collation est servie sur des plateaux d’or.

Déjà les voyageurs sont étendus sous la tente fraîche, ôtant leur casque, dégrafant leur baudrier.

Les draperies de l’entrée, largement relevées, laissent voir le paysage, et la rivière claire et rapide.

— Qu’est-ce donc, là, cet homme, debout sur une pierre, qui nous tourne le dos et regarde au loin si attentivement ?

— Un voyageur comme nous, sans doute.