Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/204

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traient comme des arabesques ; des mailles d’or et d’argent, formant une draperie souple, tombaient du casque pour protéger la nuque et le cou ; la cotte de mailles était aussi d’argent et d’or ; le brassard éblouissait, il était incrusté de diamants entourant un cabochon, énorme et fameux, appelé l’Éclair. Le bouclier, orné d’un tigre de rubis et d’émeraudes, se voilait d’un réseau de perles.

Chanda-Saïb présenta au Soubab les trois chefs français, qui avaient mis pied à terre. Mouzaffer leur tendit la main, les invita à se réconforter, car on se battrait sans doute ce jour-là même. Puis il regarda défiler, d’un air de plus en plus surpris et déçu, les quatre cents Français, dont les uniformes sévères contrastaient tristement avec les somptueux costumes des Maures, les sept cents cipayes et les six pièces de canon.

Quand ce fut fini, il attira Chanda-Saïb dans la tente.

— Mais c’est une dérision ! s’écria-t-il d’un ton irrité. Que veux-tu que je fasse de cette poignée de soldats ? Tu as six mille hommes ; c’est à peine si j’en ai autant ; et voilà ce que tu comptes opposer à l’armée d’Allah-Verdi ? Mais nous sommes perdus, malheureux ! car nous ne pouvons plus reculer ; notre ennemi est sorti d’Arcate et, campé à peu de distance, nous attend pour livrer bataille.

— Si tu avais vu comme moi ces Français à l’œuvre, Lumière de mes yeux, tu ne t’inquiéterais pas de leur petit nombre ; il était plus faible encore, quand ils ont dispersé comme de la poussière cette même