Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/232

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— Non, VOUS n’avez rien, dit Kerjean ; beaucoup d’égratignures et de contusions ; ce coup au front saigne assez fort, mais n’est pas profond.

Et il s’agenouilla pour panser provisoirement la blessure.

— Hâtons-nous de nous éloigner, dit Naïk qui tremblait d’inquiétude.

Bussy se souleva ; il aperçut la blancheur du palais de marbre, et y attacha un regard plein de reconnaissance et de tendresse. Oubliant la trahison, il revoyait, à travers ces murs, la chambre octogonale, aux panneaux d’ivoire, où sa divine ennemie avait pleuré d’amour sur son cœur. Et il soupira de regret, quand ses amis, le soutenant, lui firent descendre les marches glissantes de la terrasse.

Une masse noire, énorme, au bas des degrés sortait de l’eau.

— Qu’est-ce donc ? dit le marquis.

— Votre éléphant, Ganésa, répondit Kerjean, sans lui nous n’aurions pas pu arriver jusqu’à vous, car il n’y avait pas la moindre barque, et hommes ou chevaux, à la nage, eussent été dévorés par les innombrables caïmans qui montent la garde autour de cet aimable palais.

— Princesse, dit Bussy en portant à ses lèvres la petite main que Lila lui tendait, comment pourrai-je jamais te témoigner ma gratitude ?

— En guérissant de tes blessures, répondit Lila et en m’en donnant la nouvelle.

— Hélas ! pourquoi n’a-t-elle pas ton cœur ? murmura le marquis.