Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/299

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propre fille. Il peut les choses les plus impossibles ; s’il le voulait, il te rendrait amoureuse de… Panch-Anan.

La reine se mit à rire en secouant la tête :

— Je l’en défie, dit-elle.

— Malheureuse ! défier le Dieu des dieux ! et ne pas prévenir sa vengeance par la plus légère offrande !

— Eh bien, voici, dit-elle.

Et Ourvaci s’avança en hésitant un peu, tendant, du bout des doigts, un lotus bleu qu’elle tenait à la main.

Elle posa la fleur sur le socle de marbre et, en même temps, leva sur le beau jeune homme souriant, un long regard chargé d’une involontaire supplication.

— Me voilà rassurée, dit Lila avec un soupir de soulagement, je tremblais de te voir en guerre avec le tout-puissant Kama-Deva, car je crois en lui maintenant, je suis persuadée qu’il fait des miracles.

— Il oublie de te prévenir, pourtant, que tu perds en ce moment cette mystérieuse lettre que tu avais si soigneusement cachée dans ta ceinture.

Et Ourvaci poussa du bout de son pied la lettre tombée sur le sol. Vivement, la princesse la ramassa.

— Cette lettre contient justement le miracle, dit-elle ; si tu voulais la lire, tu en serais convaincue.

— Voyons, dit la reine, sans essayer de cacher son impatiente curiosité.

Elle prit la lettre et la garda un instant, avant de l’ouvrir, examinant avec intérêt l’empreinte sur la cire, des armoiries surmontées d’une couronne.