Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/178

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vous ne changerez rien à leur aspect pacifique ; vous les laisserez pourvues de leurs engins de pêche et les tiendrez prêtes à prendre la mer au premier signal.

— C’est entendu, dit Raïden.

— Je vous fournirai des armes, continua le prince ; mais vous les cacherez soigneusement ; vous devez avoir l’air de pêcheurs et non de guerriers.

— Très bien ! nous comprenons, s’écria Raïden, qui, debout les bras croisés, écoutait le prince attentivement.

— Je n’ai pas autre chose à vous commander pour le moment, dit Nagato ; seulement, tenez secrètes nos conventions.

— Nous n’en parlerons pas même aux mouettes qui passent sur la mer.

— Le prince ouvrit sa ceinture et versa sur le plancher un monceau d’or.

— L’engagement commence aujourd’hui même pour ceux qui sont présents ici, dit-il, et je vais compter à chacun de vous cent kobangs. Vous choisirez parmi vos compagnons le nombre d’hommes nécessaire pour compléter ma petite troupe ; engagez les plus braves, les plus discrets.

— Les marins ne sont pas bavards, dit Raïden.

— Les pêcheurs surtout, le bruit effraie le poisson.

— Allons, Loo, dit-il, le prince vient compter l’argent.

Loo s’approcha et commença à ranger par piles les petites lames d’or.

Chaque homme s’avança à son tour et dit son nom, que Nagato écrivait sur une longue feuille de papier.

Le prince regardait avec plaisir le visage naïf et intrépide de ces hommes qui venaient de lui vendre leur vie ; il se disait que rarement à la cour il avait ren-