Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/199

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voyais pas plus que si j’avais eu la tête dans un sac de velours noir.

— Et lorsque cette colonne d’eau est tombée sur toi, qu’as-tu pensé ?

— J’ai pensé que j’étais mort, mais que la jonque coulerait bien sûr ; j’ai entendu comme le bruit du tonnerre, et j’ai bu ! j’ai bu ! ar le nez, par la bouche, par les oreilles, et puis je n’ai plus rien senti, je ne me souviens plus.

— Tu étais bien près de la mort, mon pauvre Loo, dit le prince ; mais pour ta belle conduite, je te donnerai un beau sabre, bien aiguisé, et tu pourras le porter à ta ceinture, comme un seigneur.

Loo promena sur ses compagnons, éclairés par la lune, un regard plein d’orgueil, accompagné d’un sourire, qui gonflait ses joues et y creusait deux fossettes.

Une lueur bleue et vaporeuse s’épandait sur la mer, on pouvait voir à une assez grande distance.

— Deux jonques ont disparu, dit Nagato, qui regardait du côté de l’île, la troisième se dresse encore.

— Il me semble voir des chaloupes tourner autour d’elle, nos amis se seraient-ils laissé surprendre ?

Tout à coup la jonque s’inclina sur le côté, et aussitôt une petite barque se détacha, qui fuyait.

Les chaloupes, pleines de soldats, se mirent à sa poursuite en lançant vers elle un essaim de flèches.

De la barque on lâcha quelques coups de feu.

— Courons vite à leur aide ! s’écria le prince.

Déjà Raïden avait fait virer le canot, l’autre barque, qui les accompagnait, les suivit de près.