Page:Gautier - Le Collier des jours.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
107
le collier des jours

Mais plus que tout cela, ce qui me rendait si fière, c’est que, pour la première fois, j’avais une ombrelle. Peut-être, quelque atavisme oriental me faisait deviner la majesté symbolique du parasol, puisque ce petit dôme de soie, abritant ma tête, me donnait tant d’orgueil. Il faisait un soleil radieux et je marchais sur la route, en me dandinant, évitant l’ombre des verdures neuves, pour mieux jouir de mon ombrelle.

Des personnes venaient derrière moi, et très certainement m’admiraient. — Qu’auraient-elles pu faire de mieux ?… — car elles chuchotaient entre elles.

Cependant quelque chose m’inquiétait, et me faisait regretter ma trop grande hâte à m’échapper d’entre les mains des tantes. On avait oublié mes jarretières !… Peu à peu les bas à jours glissaient ; je les sentais mollir, s’affaisser, me chatouiller déjà les genoux. Ces inconnus, qui me suivaient, n’allaient pas s’apercevoir de cela, je l’espérais bien, le reste de ma toilette avait de quoi distraire l’attention, la détourner de ce fâcheux détail.

Je fus brusquement détrompée par une remarque, exprimée à haute voix, et qui me fit froid dans l’estomac.

— Quel dommage qu’une petite fille, aussi