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le collier des jours

mais. On disait qu’elle refusait de se confesser et ne voulait pas communier. Quelquefois pourtant, elle tenait l’orgue : on entendait alors une musique peu ordinaire, qui roulait et grondait, ne s’arrêtait pas où il fallait, ne tenait compte de rien et désorganisait tout l’office.

Beaucoup de religieuses semblaient la fuir ; elle n’en recherchait aucune, et l’on restait des semaines sans apercevoir sa pâle figure, de plus en plus morne et navrante.

Quel contraste avec la sœur Sainte-Barbe, rayonnante de santé et de joie, sous son voile noir, et qui ne manquait jamais de me crier, quand je la rencontrais :

— Tu vois, comme je suis heureuse !…

Un matin, au moment où l’on entrait en classe, on entendit, tout à coup, des cris effrayants, qui partaient de l’étage où était située l’infirmerie ; puis une fenêtre s’ouvrit, laissant passer des hurlements plus aigus encore et se referma brusquement, tandis que des vitres cassées tombaient dans la cour.

Maîtresses et élèves s’étaient précipitées dehors, dans l’angoisse et la surprise.

Après des intervalles de silence, les cris reprenaient, vraiment terribles. On vit sortir des religieuses, qui couraient vers la chapelle en se bouchant les oreilles.

Était-ce le feu ? On eût dit vraiment les hurle-