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le collier des jours

l’obscurité, je restais dans le noir de l’antichambre, assise sur une banquette trop haute, près de la porte de sortie, la porte fermée à clé et verrouillée, mais qui peut-être s’ouvrirait une fois, pour me laisser m’enfuir. On ne pouvait m’arracher de là, et on arrivait à m’y abandonner, se disant, sans doute, que ce chagrin d’enfant finirait bien par passer.

Il ne passait pas, je sanglotais sans relâche, et j’ai encore l’horrible sensation de cet étranglement, de cette suffocation ; de la brûlure sur mes joues et ma bouche, des larmes que je n’essuyais pas. Cela finit par devenir un hoquet saccadé et convulsif, que rien ne pouvait arrêter.

Combien cet état dura-t-il ? Je ne sais. Je ne vois plus que la délivrance à l’entrée de Marie, accompagnée du docteur Aussandon.

— Marie ! Marie !

J’étais dans ses bras, cramponnée à elle et je crois qu’il eût été difficile de m’arracher de là.

Elle pleurait, et, avec le mouchoir dont elle s’épongeait les yeux, elle essuya doucement mon visage tout bouffi et gercé par les larmes.

Le docteur apportait une nouvelle grave. La nourrice avait eu un tel chagrin de la séparation, qu’une révolution de lait s’était déclarée.

Marie, affolée, était partie en courant pour