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LE PRINCE À LA TÊTE SANGLANTE

— Parlez !

— Les Chinois ont franchi la frontière d’Annam,

— Ils couvrent les montagnes de Langson, emplissent les vallées.

— Lu-Lan, un de leurs chefs les plus vaillants, marche à leur tête.

— Les Dieux marchent avec nous, dit le roi, et comme toujours ils nous conduiront à la victoire. Fais ton devoir, Lée-Line, préparez-vous tous pour une grande bataille. Demain, dès l’aube, nous livrerons un combat décisif. Laissez-moi maintenant seule avec ma sœur ; nous passerons la nuit en prières.

Le roulement des chars de guerre, répercuté par les gorges des montagnes, le piétinement cadencé des chevaux en marche, le heurt des armes, les ordres hurlés par des voix rauques, les galops précipités sur les pentes vertes des collines ; puis la mêlée furieuse, sous les étendards qui flottent et le hérissement des lances[1] !

L’océan chinois a débordé dans les vallées de l’Annam, mais la libératrice du royaume se dresse devant lui comme une digue, l’empêche d’aller plus loin, le repousse.

  1. Cette bataille fut livrée l’an 42 de notre ère.