Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/207

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monstrueuses ; des pièces de bois, des briques moulées, rangées en tas, encombraient le chemin. Du silence se dégageaient des bruits étranges, inquiétants ; une chouette coupait l’air de son aile muette ; des chiens maigres, levant leur long museau pointu, suivaient d’un aboiement plaintif le vol inégal d’une chauve-souris ; des scarabées et des reptiles peureux se sauvaient en faisant bruire l’herbe sèche.

« Est-ce que Harphré aurait dit vrai ? pensait Tahoser, impressionnée par l’aspect sinistre du lieu ; Poëri viendrait-il là sacrifier un enfant à ces dieux barbares qui aiment le sang et la souffrance ? Jamais endroit ne fut plus propice à des rites cruels. »

Cependant, profitant des angles d’ombre, des bouts de mur, des touffes de végétation, des inégalités de terrain, elle se maintenait toujours à une distance égale de Poëri :

« Quand je devrais assister, témoin invisible, à quelque scène effroyable comme un cauchemar, entendre les cris de la victime, voir le sacrificateur les mains rouges de sang retirer du petit corps le cœur fumant, j’irai jusqu’au bout », se dit Tahoser en regardant le jeune Hébreu pénétrer dans une hutte de terre dont les crevasses