Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/219

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

même la figure, et qui marche comme une reine sous des vêtements splendides. »

Le raisonnement de Timopht ne parut pas convaincre Pharaon ; il appuya son menton dans sa main et réfléchit quelques minutes. Le pauvre Timopht attendait en silence, craignant quelque explosion de fureur. Les lèvres du roi remuaient comme s’il se fût parlé à lui-même : « Cet humble habit était un déguisement… Oui, c’est cela… Ainsi travestie, elle est passée de l’autre côté du fleuve… Ce Timopht est un imbécile, sans la moindre pénétration. J’ai bien envie de le faire jeter aux crocodiles ou rouer de coups… — mais pour quel motif ? Une vierge de haute naissance, fille d’un grand prêtre, s’échapper ainsi de son palais, seule, sans prévenir personne de son dessein !… Il y a peut-être quelque amour au fond de ce mystère. »

À cette idée, la face du Pharaon s’empourpra comme à un reflet d’incendie : tout le sang lui était monté du cœur au visage ; à la rougeur succéda une pâleur affreuse, ses sourcils se tordirent comme les vipères des diadèmes, sa bouche se contracta, ses dents grincèrent et sa physionomie devint si terrible que Timopht épouvanté