Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/293

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vant toi comme les grains de sable que soulève le vent du sud ; je le sais, répliqua Tahoser.

— Et pourtant je ne puis me faire aimer de toi, dit Pharaon en souriant.

— L’ibex a peur du lion, la colombe redoute l’épervier, la prunelle craint le soleil, et je ne te vois encore qu’à travers les terreurs et les éblouissements ; la faiblesse humaine est longue à se familiariser avec la majesté royale. Un dieu effraie toujours une mortelle.

— Tu m’inspires le regret, Tahoser, de n’être pas le premier venu, un oëris, un monarque, un prêtre, un agriculteur, ou moins encore. Mais, puisque je ne saurais faire du roi un homme, je peux faire de la femme une reine et nouer la vipère d’or à ton front charmant. La reine n’aura plus peur du roi.

— Même lorsque tu me fais asseoir près de toi, sur ton trône, ma pensée reste agenouillée à tes pieds. Mais tu es si bon, malgré ta beauté surhumaine, ton pouvoir sans bornes et ton éclat fulgurant, que peut-être mon cœur s’enhardira et osera battre sur le tien. »

C’est ainsi que devisaient Pharaon et Tahoser ; la fille du prêtre ne pouvait oublier Poëri, et cherchait à gagner du temps en flattant de quelque