Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/89

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tendaient diagonalement et frémissaient sous les doigts longs et menus de la harpiste, qui souvent, pour atteindre les notes graves, se penchait, avec un mouvement gracieux comme si elle eût voulu nager sur les ondes sonores de la musique, et accompagner l’harmonie qui s’éloignait.

Derrière elle, une autre musicienne debout, qu’on aurait pu croire nue sans le léger brouillard blanc qui atténuait la couleur bronzée de son corps, jouait d’une espèce de mandore au manche démesurément long, dont les trois cordes étaient coquettement ornées, à leur extrémité, de houppes de couleur. Un de ses bras, mince et rond cependant, s’allongeait jusqu’au haut du manche avec une pose sculpturale, tandis que l’autre soutenait l’instrument et agaçait les cordes.

Une troisième jeune femme, que son énorme chevelure faisait paraître encore plus fluette, marquait la mesure sur un tympanon formé d’un cadre de bois légèrement infléchi en dedans et tendu de peau d’onagre.

La joueuse de harpe chantait une mélopée plaintive, accompagnée à l’unisson, d’une douceur inexprimable et d’une tristesse profonde.