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le second rang du collier

travail, je dus faire connaissance avec la bibliothèque de la rue de Richelieu. Là seulement on pouvait trouver des livres chinois. Presque chaque jour, accompagnée de Ting, qui me tenait lieu de duègne, j’allais m’installer dans la salle des manuscrits et nous fouillions les recueils de poésies, pour y découvrir des poèmes à notre goût, les copier, afin de les emporter et de les étudier à loisir. J’aimais beaucoup ce milieu solennel et austère, si calme et si studieux ; il m’en imposait un peu et je n’osais parler que tout bas.

La première fois que je vins à la Bibliothèque, cependant, il se produisit un incident qui faillit bien m’empêcher d’y revenir jamais. À quatre heures, les garçons de salle firent retentir leur impératif : « Messieurs, on ferme ! » Ayant jeté un rapide coup d’œil sur les travailleurs, je vis que personne ne bougeait. Je crus avoir le droit de ne pas me presser plus que les autres. Alors un des garçons cria tout près de nous :

— On ferme !

Nous nous dépêchions, Ting et moi, de terminer la copie de quelques vers ; mais le garçon, s’adressant directement à nous, cria encore une fois :

— On ferme !

Aussitôt, à une table assez distante, un monsieur se leva, furieux, et interpella violemment l’employé :

— Vous n’êtes qu’un malappris ! voilà deux fois