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le second rang du collier

dû soutenir un combat singulier avec un boa, qui avait failli le dévorer.

Théophile Gautier suivit le récit jusqu’à la fin, puis il dit à son ami, de sa voix la plus tranquille :

— Mon cher X…, écoute ceci pour ta gouverne ! Quand tu raconteras ta petite histoire, dans les sociétés, remplace le boa par un crocodile : il n’y a pas de constrictors en Égypte…

Épris des arts plastiques comme il l’était, Théophile Gautier rédigeait ses Salons avec moins de répugnance que ses chroniques dramatiques. Parmi les tableaux et les marbres il pouvait encore choisir ses thèmes, et il s’ingéniait à transposer l’art des formes, en son style coloré et pittoresque. Il travaillait à la maison, ou quelquefois, pour aller plus vite, il écrivait ses articles, sur son carnet de notes, à l’Exposition même.

Moi aussi, j’écrivis un Salon : mon père m’avait beaucoup engagée à le faire, pour m’exercer, disait-il, à la critique, et il paraissait dans le journal l’Entracte. Ce compte rendu était extrêmement gauche et succinct, car je n’avais pas — et je n’eus jamais — l’esprit d’analyse, sachant très mal expliquer, le pourquoi de mes enthousiasmes et de mes haines, néanmoins très violentes et intransigeantes. Un passage de ces articles, si maladroits, eut cependant une gloire imprévue. Il se rapportait à un tableau d’Ernest Hébert :