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le second rang du collier

Je retins un sourire, et mon père échangea avec moi un imperceptible clignement d’yeux : nous pensions tous deux que c’était plutôt le contraire…



Quand approchait le printemps, l’époque des expositions, les peintres affluaient à la maison. Théophile Gautier était du jury de peinture, et les articles du grand critique faisaient, mieux que tous autres, les réputations : on connaissait sa bienveillance, pas si débonnaire cependant qu’on voulait le croire, et bien souvent aiguisée d’ironie, pour qui savait lire entre les lignes. Mais la brutalité lui répugnait, et tout effort sincère lui semblait digne d’égards.

Dans la conversation il apportait la même urbanité, et, si quelque hâbleur croyait pouvoir lui conter de folles histoires, il le laissait aller jusqu’au bout, se gardant bien de lui couper son effet ; puis, d’un coup de griffe, léger mais sûr, il faisait crouler le château de cartes.

Un peintre, de grand talent, lui narrait, une fois, d’étonnantes aventures de voyages. — José-Maria de Heredia, un jeune et charmant poète que nous voyions pour la première fois, était à Neuilly, ce jour-là. — L’artiste racontait, entre autres, une excursion en Égypte, au cours de laquelle il avait