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le second rang du collier

rité, qu’on ne grondait pas, qu’il nous était permis de faire ce que nous voulions, de dire toutes les folies qui nous passaient par la tête. Nous n’abusions pas trop de la licence et, en général, nous étions très sages. Par les temps maussades, nous restions dans la chambre du père ; tous assis par terre, sur le tapis, étayés de coussins, nous bavardions sans relâche.

Parfois, avec une verve comique, qui nous donnait le fou rire, Théophile Gautier s’amusait à parodier quelque chef-d’œuvre, lui qui prétendait ne rien comprendre aux parodies et qui détestait par-dessus tout la caricature. Mais il voulait prouver que, pour faire un pastiche ou une charge, pour exagérer d’une façon juste la manière ou les traits, dans le sens ridicule, il fallait parfaitement comprendre et avoir beaucoup de talent. D’après lui, jamais les partisans du classique et du poncif n’étaient parvenus à parodier Victor Hugo : les tons rutilants manquaient sur leurs palettes, et, malgré eux, leurs grises platitudes se moquaient plutôt de ce qu’ils voulaient défendre.

Une fois, il nous résuma, en un discours d’une gaieté étincelante, l’œuvre de Paul de Kock ! — pour nous épargner, disait-il, la peine de la lire dans un style grossier et bourgeois. — Certes, personne n’a connu un Paul de Kock d’une telle drôlerie et aussi bon écrivain ! Quel dommage qu’un phonographe n’ait pas conservé cette étonnante