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le second rang du collier

larges corridors voûtés de cette maison, qui était une ancienne abbaye et semblait hantée par des ombres.

Le monde invisible paraissait s’émouvoir et s’efforcer d’entrer en communication avec ce vivant, créateur d’une fiction, dont l’héroïne était un esprit.

Au fur et à mesure que l’auteur l’écrivait, le roman paraissait en feuilleton dans le Moniteur, et le succès littéraire de Spirite fut doublé d’un autre succès, sur lequel on ne comptait pas : les médiums, les magnétiseurs, les partisans des tables tournantes, ceux qui interrogent les esprits frappeurs, les swedenborgiens, s’émurent et adressèrent à Théophile Gautier les lettres les plus singulières et les plus folles. Un monsieur de Grenoble, qui signait « P. S. », affirmait être Malivert et visité par une Spirite : il ne pouvait s’expliquer comment l’auteur du roman avait appris cette histoire. Un autre, qui venait de perdre une amie adorée, demandait sérieusement les formules d’évocation. La Neue freie Presse, de Vienne, reconnaissait un médium en Théophile Gautier ; un autre journal, allemand celui-ci, prétendait que Spirite avait été commandé par le gouvernement pour occuper les esprits et détourner leur attention du projet d’annexion de la Belgique. Par l’entremise d’une dame inconnue, Alfred de Musset envoya, de l’autre monde, à Théophile Gautier les vers suivants, inspirés par Spirite :