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LE COLLIER DES JOURS

Il le revêtait souvent et, seul dans sa chambre, devant une glace, il passait des nuits à chercher des effets. Un maillot rembourré avait seul survécu de ce costume, et Villiers le mettait quelquefois, pour aller dans le monde, quand il voulait avoir de belles jambes.

Cette lecture de la Révolte, à Tribschen, devant Richard Wagner, fut pour l’auteur de cette œuvre un moment glorieux.

Il n’était plus question, quand il lisait ou déclamait, de bredouillements, ni de phrases entrecoupées. D’une voix claire et bien timbrée il détaillait le texte, avec un art parfait, et donnait aux sentiments et aux caractères un relief remarquable.

On l’écouta dans un religieux silence, avec une attention extrême et un intérêt croissant.

Il est certain que, si la pièce tomba, au Vaudeville, devant les philistins qu’elle flagellait, elle eut d’avance sa revanche en cette soirée, car elle remporta un éclatant succès.

— Vous êtes un vrai poète, dit Wagner à l’auteur qui exultait de joie, et je voudrais vous voir jeter sur le monde idéal, plus important que le réel pour nous artistes, le regard pénétrant dont vous avez transpercé le monde